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Rétro : Yoshi’s Island (SNIN)

, par RYoGA

Yoshi’s Island, l’un des plus grands jeux de plate-forme qui soit ? J’en suis persuadé et je compte bien vous le prouver !

Vade retro publié sur Puissance Nintendo

Remettons-nous dans le contexte

Retour fin 1995. La Super Nintendo, c’est triste à dire, est en fin de vie. Les consoles de nouvelle génération, la PlayStation et la Saturn, viennent de débarquer en Europe et, avec leurs graphismes 3D, ringardisent immédiatement la 16 bits. Et pourtant, la Super Nintendo n’entend pas partir la tête basse. Après le flamboyant Donkey Kong Country, elle dispose encore de quelques cartouches pour finir en beauté, et même narguer la concurrence. L’un de ces jeux est Yoshi’s Island.

Yoshi’s Island n’est autre que la suite de Super Mario World, le Mario qui était disponible au lancement de la console en avril/mai 1992. Il aura donc fallu aux joueurs attendre tout ce temps pour retrouver une nouvelle aventure inédite du plombier. Il y avait bien eu Super Mario All-Stars en 1993, mais ce n’était qu’une reprise - certes brillante - des trois premiers opus sur NES.

Yoshi’s Island — sous titré Super Mario World 2 — sort en décembre 1995. Dans la presse vidéoludique française on peut retrouver dès le mois suivant une double page vantant les mérites du jeu par tous les magazines du moment. Le jeu a en effet récolté de très bonnes notes. Sous la jaquette, on trouve la phrase choc suivante : "Miyamoto a concentré tout son talent sur Super Mario World 2 pendant quatre ans. C’est tout dire de ses qualités."

Yoshi’s Island, un jeu en or

Pour ma part je joue activement sur Super Nintendo depuis déjà deux ans. J’ai rattrapé mon retard avec Super Mario World, que j’ai retourné dans tous les sens, Super Mario Kart, que je ne lâche plus, Zelda 3, que je me refais régulièrement... Starwing m’a bluffé et fin 1994 sortent trois grands jeux qui ne me lâcheront pas de l’année 1995 : Donkey Kong Country, Earthworm Jim et Secret of Mana. En décembre 1995 je suis là, prêt pour dévorer mon premier Mario acheté Day One.

La première surprise concerne le fait que l’on n’incarne plus Mario à proprement parler mais Yoshi, qui n’était qu’une monture disponible quelques niveaux dans Super Mario World. Le personnage de dinosaure vert fut un énorme succès au Japon lors de la sortie de SMW, ce qui explique peut-être pourquoi Shigeru Miyamoto a choisi d’en faire le personnage principal. Mario y est relégué qu’en tant que bébé que l’on transporte sur son dos !

Yoshi peut sauter sur ses ennemis, mais aussi les écraser avec l’attaque rodéo — qui apparaît ici pour la première fois (Mario la réutilisera dans Super Mario 64). Mais ce n’est pas tout !

Il peut surtout gober des ennemis avec sa langue et en faire des œufs qui se baladent derrière lui, jusqu’au nombre de six. Il serviront de projectiles à balancer dans les airs, suivant la trajectoire d’un viseur qui apparait alors en mouvement de haut en bas. Les objectifs sont multiples : ennemis, ennemis volants, nuages à bonus, ou mécanismes à atteindre directement ou par rebonds. Les œufs, qui peuvent aussi être obtenus dans des boîtes dédiées, changent de couleur en fonction du nombre de rebonds effectués, pour peu qu’on arrive à les attraper d’un coup de langue en vol. L’intérêt ? Les œufs de couleur offrent des bonus quand on les envoie ensuite sur un ennemi : les jaunes donnent des pièces et les rouges des petites étoiles.

En un seul nouveau mécanisme de gameplay, Miyamoto renouvelle totalement le style de jeu Mario. Peut-être d’ailleurs un peu trop aux yeux des joueurs occasionnels familiarisés aux Super Mario Bros classiques. Yoshi’s Island ne deviendra jamais la branche principale de la saga mais lui donnera un vent de fraîcheur et surtout un bon gros jeu culte pour de nombreux gamers.

Autre mécanisme de gameplay : lorsque Yoshi se fait toucher, le bébé Mario qui est sur son dos s’envole dans une bulle. Il faut à tout prix le récupérer avant que le décompte qui s’affiche n’atteigne zéro ! Auquel cas les sbires de Kamek (le grand sorcier méchant de l’histoire) viennent enlever le môme, et c’est le game over ! Le décompte, qui revient quoi qu’il arrive à 10 si vous êtes descendu plus bas, peut monter jusqu’à 30 si vous ramasser des petites étoiles souriantes sur pattes. Elles sont le plus souvent dans des nuages et font parti des objets à collectionner, avec les pièces rouges et les fleurs, pour faire un niveau à 100 %.

Passage de relai

Les Yoshi de l’île sur laquelle a atterri le bébé sont solidaires : ils se passent le «  paquet  » de niveau en niveau. Ainsi à chaque niveau le Yoshi que l’on incarne est différent... et il revêt une autre couleur. Aucun intérêt mais c’est mignon. La carte aligne les cases de chacun des huit niveaux de chacun des six mondes. La quatrième case est généralement celle du château du boss de mi-niveau. La huitième celle du boss de fin de monde. Deux cases supplémentaires se débloquent si vous finissez les mondes et si vous les finissez à 100%. Il s’agira d’un mini-jeu rencontré dans les phases bonus, mais aussi d’un niveau à part entière et à la difficulté sacrément relevée.

La plupart du temps, les boss sont des monstres normaux rencontrés un peu plus tôt qui sont envoûtés par Kamek pour devenir plus fort, plus grand, et remontés contre nous. On citera le Gros Bélixo qui perd sa culotte au fur et à mesure des œufs qu’il reçoit dans la figure ou l’espèce de marshmallow informe qui déglutit des versions miniatures de lui-même, et ça, ce ne sont que ceux du premier monde.

Les boss, souvent immenses et changeant de taille au fur et à mesure des coups, sont souvent l’occasion de montrer ce que la Super Nintendo a dans le ventre en terme technique. Le jeu utilise la puce technique appelée "Super FX 2", soit la deuxième version de celle utilisée dans Starwing deux ans plus tôt. D’ailleurs le jeu ne manque pas d’effets spéciaux impressionnants avec des éléments de décors en 3D qui bougent de tous les côtés, mais toujours pour servir le gameplay.

Comment ne pas citer le boss Grenouille (est-ce une version de Wart de Super Mario Bros. 2 ?) que l’on affronte depuis son estomac, où l’on évite les sucs gastriques qui vous tombent dessus, et où on cherche péniblement à toucher sa glotte, ou alors le boss final, servi par une réalisation technique incroyable ? Le jeu sait donc impressionner, mais ravir aussi, car rempli de petites attentions, à l’image de ce thème de l’overworld qui s’enrichit de sonorités au fur et à mesure que l’on passe les niveaux.

Un jeu plein de surprises (comme un Kinder)

Si finir le niveau — et si possible collecter tous les objets bonus à 100 % — sera votre but, n’en oublions pas le voyage. Chaque niveau regorge ainsi de surprises et propose toujours des situations nouvelles. Le magazine Consoles + ne dit-il pas lui-même à l’époque : «  Un stage de Yoshi’s Island vaut à lui tout seul n’importe quel autre jeu de plateformes  » ? Cette phrase, vous l’aurez peut-être reconnue car on la croise souvent lorsqu’un jeu Mario sort. C’était déjà le cas avec Super Mario Galaxy (et c’était très mérité). Et on la ré-entendue avec Super Mario 3D World (Pas faux mais peut-être pas non plus aussi évident que les deux autres).

Et ô combien Consoles + a raison ! Reprendre le jeu aujourd’hui ne vous le fera peut-être pas comprendre, car depuis tous les jeux s’en sont inspirés, mais à l’époque, c’est juste la claque. L’innovation avec un grand I. Le level design grouille de nouvelles idées, de personnages ennemis aux comportements différents et de systèmes de mécanismes renouvelés. Inconcevable d’avoir ça sur les consoles 32 bits qui commencent à peine à sortir des plateformers en 3D valables.

Inconcevable non plus pour la concurrence sur la même console : Donkey Kong Country 2 sort en février 1996 et même si le jeu est un carton amplement mérité, Yoshi’s Island le bat à plate couture sur le terrain de la technicité du gameplay et du level design. Il n’y a qu’à comparer les déplacements des ennemis de Y’sI et ceux de DKC2, qui font des allers-retours sur place ou au mieux des sauts. Je ne cherche pas à dire que DKC2 est moins bon (j’adore ce jeu, et son ambiance et ses graphismes sont tops), simplement à rappeler que Yoshi’s Island était ce qui se faisait de mieux au niveau du gameplay, toutes consoles confondues.

Plateformes tournantes, qui s’écroulent ou qui rebondissent, tous les classiques sont là, mais ils sont magnifiés par des éléments de décors complètements fous qui se dévoilent niveaux après niveaux. Poissons qui vous jettent de l’eau à la figure, oiseaux ou ballons sur lesquels monter, spores de cotons qui troublent la vision (le fameux niveau "Cotonou prout prout"), sphères qui préfigurent Mario Galaxy avant l’heure… les surprises ne manquent pas !

Et comme si ça ne suffisait pas, des séquences où Yoshi se transforme en véhicules viennent apporter un vent de fraîcheur à l’ensemble. Des bulles transforment Yoshi en hélicoptère, en taupe et autres choses, le temps d’une séquence limitée où l’on va chercher les fameux bonus du niveau. Un peu plus loin Bébé Mario reprend le pouvoir et avec une étoile se met à caracoler le long des murs, reléguant Yoshi dans un gros œuf («  alors ça fait quoi d’être enfermé hein !?  »).

Mais c’est de l’art !

Si Super Mario World était joli mais plutôt sage, ce nouvel épisode laisse éclater toute la créativité de ses concepteurs. De là se crée un thème «  enfantin  », lié aux Bébés Mario et Luigi de cet épisode. Enfantin = pour les bébés ? Que nenni ! Les traits des environnements sont grossis, comme s’ils étaient dessinés avec de gros Crayola. Les fonds de décors sont pastels et composés d’éléments animés sommairement pour donner un petit côté chatoyant qui réveille l’enfant solaire qui est en nous. En somme, c’est très osé ! Une prise de risque qui fait mouche et qui ravit, niveau après niveau.

Les sprites des personnages sont très expressifs et carrément cartoons, dans la continuité de ce que Super Mario World avait engagé.

De nouveaux thèmes musicaux viennent ravir les oreilles et s’avèrent particulièrement entrainants. Les bruitages sont amusants : Yoshi pousse des cris très gutturaux en fonction de ses actions, et les ennemis ont chacun leur petite identité sonore.

L’héritage de Yoshi’s Island

Yoshi’s Island bouclera pendant quelques années la saga Mario en 2D pure et dure. En 1997 sortent sur Nintendo 64 Super Mario 64 en full 3D et Yoshi’s Story en 2D ornée de sprites 3D. Yoshi’s Story devient pour le coup vraiment facile et pour les enfants, là où Yoshi’s Island savait convaincre les gamers avertis.

Yoshi’s Island revient en 2003 en portage avec Super Mario Advance 3 sur Game Boy Advance. Le jeu bénéficie de quelques améliorations graphiques et sonores pas indispensables, d’autant que la zone d’écran est réduite pour le format de la portable et que les musiques souffrent quelque peu de la conversion. C’est cette version que l’on a pu retrouver dans le programme ambassadeur de la 3DS, et aujourd’hui sur la Console Virtuelle de la Wii U (le jeu sort le 24 avril).

Il faut attendre 2006 et Yoshi’s Island DS pour voir une vraie suite. Reprenant beaucoup de l’épisode original, le gameplay s’enrichit de bébés différents (Peach, DK, Wario et Bowser) pour varier le gameplay. Mais le titre titre n’a rien de mémorable.

Récemment est sorti Yoshi’s New Island sur 3DS. Simple mise à jour d’univers à présent vus et revus, disposant de phases en véhicule contrôlables au gyroscope peu amusantes, ce troisième épisode n’apporte rien de nouveau, délave un peu la formule et ne satisfera que les nouveaux joueurs... Yoshi’s Island sur Super Nintendo reste inégalé.

Pour terminer, nous vous proposons une vidéo de découverte de Yoshi’s Island sur Super Nintendo :

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Quelque part en orbite de la série Super Mario, Yoshi’s Island est un hit incontournable. On regrettera juste de ne pas l’avoir eu à disposition sur la Console Virtuelle de la Wii (ou même de la Wii U dans sa version Super Nintendo). Bientôt vous pourrez jouer à la version GBA sur Wii U, un portage tout à fait valable pour découvrir ce hit.